Dans ce lieu qu’est ma chambre, mon refuge et mon arsenal, seul le bruit très léger d’une feuille qui glisse contre le vent pouvait se faire entendre. Ni les oiseaux, ni la nature ne semble faire de bruit en cette fin de nuitée. Ce manque de bruit me permet de rester captiver par le parchemin que je fais danser avec mes doigts. Une lettre officielle que j’avais reçue il y a environs deux jours, concernant ma prochaine mission… Une mission de rang C.

Je dois avouer que je suis plus que surprise de recevoir une mission de ce niveau. Après tout, cela fait un peu plus d’un mois seulement que je suis revenue au service du village. Et bien que je récupère petit à petit mes capacités, je me suis dit que le village ne me voit pas différent d’un ninja qui vient de recevoir son bandeau. Il semble que j’ai tort sur ce point, la lettre suffit à montrer l’erreur de mon jugement.

De nouveau, avec mes doigts tremblant d’excitation, je déplie la missive, pour lire l’ordre de mission, une énième fois. Celle-ci est simple, escorter un marchand d’un autre pays, Tsuki no Kuni, à notre village. Enfin, escorter. Nous sommes plus des guides qu’une escorte, celui qu’on doit protéger possède sa propre garde personnelle. Mais je ne vais pas m’en plaindre, je vais pouvoir explorer le monde dans une mission sans grande embûche. Il y a cependant un problème dans toute cette histoire. Ce n’est bien sûr aucunement les partenaires de missions que j’ai, que ce soit Kazuo, avec on a poursuivit cet étrange groupe d’artistes de l’ombre, ou bien le Yuki, dont le seul nom suffisait à donner une bonne idée des capacités, présentes ou future, du ninja, ni de notre chef de groupe, Chiba Ando, l’encyclopédie de Kiri. C’est en déposant la lettre sur la table de chevet que je vois de nouveau la problématique.

Comment je suis censé transporter autant d’affaires ?! J’ai bien sûr mon équipement de ninja, primordiale pour le bon fonctionnement de la mission ou pour ma survie. Mais ça, comment je l’amène avec moi ?! Je veux vraiment ramener tout ça, il faut bien s’occuper durant le voyage non ? Surtout que le voyage en bateau est l’occasion rêver. Une fois dessus ce dernier, je n’ai pas à me trimballer tout ça à chacun de mes pas. Mais il faut que je me fasse une raison, je vais devoir faire des choix, tant pis pour l’intégrale, je ne vais prendre que l’essentiel.

C’est donc avec un pincement à mon âme d’artiste que j’enlève de mes bagages la collection complète des poèmes d’Hanaseiran, ainsi qu’une bonne partie de mon équipement de peintre débutante ! Dessiner la mer pendant le voyage est un bon entraînement, et un peu de lecture fait toujours du bien ! Je finis par prendre avec moi uniquement le cinquième recueil, ‘ Reflets d’une aube nébuleuses’, ainsi qu’un petit canevas de voyage et quelques pinceaux et huiles, mais rien de plus. Le reste est mes affaires de rechanges, mes quelques rations de secours et mes armes de ninja bien évidemment, le tout tenant dans ma sacoche de ninja et un sac en toile. Maintenant que je suis prête, je suppose que c’est l’heure d’aller rejoindre mes camarades au port ! Enfin, après que j’ai calmé les gargouillements de mon ventre qui quémande son repas matinal. Je descends donc dans la cuisine, et je prends mon petit-déjeuner en silence, avant de lever l’ancre vers le port de Kiri. Attentionnée, je laisse une note à ma mère. Je lui ai bien signalé mon départ, mais je la connais suffisamment pour savoir qu’elle peut oublier la plus évidente des informations quand elle s’inquiète !

Le voyage vers le port se fait sans encombre. Comme à mon habitude pour mes missions, je pars tôt chaque matin, et comme toujours, le silence règne dans le village. Il est sûrement plus oppressant que d’habitude même, la brume est déjà bien présente alors que le soleil ne pointe pas encore ses premiers rayons sur Kiri. Mais après cette histoire de brume colorée, ce n’est pas ce voile monotone qui va m’effrayer et j’arrive très vite aux abords du port, où je remarque non seulement l’embarcation, et l’étrange micro fourmilière qui coagule autour de celle-ci, mais surtout Kazuo, qui est déjà sur place, ainsi qu’un autre garçon et un ninja de Kiri. Il ne m’en faut pas plus pour savoir que je suis au bon endroit.

En approchant, je peux détailler davantage notre partenaire de mission, faisant fit du chûnin que je connais déjà de quelques années en arrière, avant mon arrêt forcé. Que dire sur ce dernier, si ce n’est qu’il possède les caractéristiques d’un Yuki ? Le bleu, se mariant avec l’élément de notre pays, apparaît comme la couleur thématique du genin des glaces, faisant totale opposition avec le rouge de ma cape de voyage. Reste à savoir si nos cœurs sont aussi opposés que notre apparence. Une passion digne d’une flamme incontrôlée dirige t’elle les émotions du Yuki, ou bien est-ce un cœur aussi inerte que l’expression le laisse entendre ? Ou alors, peut-être les deux. Après tout, les statues de glaces peuvent mettre en émois bien des gens.

Je salue le groupe de la main, notant être arrivée en dernière. Pas comme si ça importe, l’aube n’est pas encore parmi nous, même si les premiers traits orangés de l’horizon montrent que la dernière invitée ne tardera pas à faire son entrée.

- Salut à tous ! Je suis Susukeru Youko, bien qu’ici, seul notre ami Yuki ne doit pas me connaître. C’est un plaisir de travailler avec vous trois. Je vois que j’arrive après les préparations. Désolée, je ne pensais pas que vous seriez aux aguets aussitôt !

L’accoutumée présentation effectue, j’arrive au niveau des deux genins, souriant à Kazuo.

- On dirait qu’une nouvelle aventure nous attend, partenaire des brumes ! J’espère que celle-ci sera aussi intéressante que la précédente. Au moins, on ne risque pas de courir dans tout le village ici !

Mon regard se tourne ensuite vers le Yuki, alors que je lui tends la main pour le saluer plus formellement.

- Comme je l’ai dit, je me nomme Susukeru Youko. Je suppose que tu es Yuki Ikazuchi, n’est-ce pas ? Enchantée de faire ta connaissance. Dis-moi, es-tu un artiste dans l’âme, toi qui peut donner vie à la glace ?

Si une chose rayonne ce matin dans la brume, c’est bel et bien l’enthousiasme de Kazuo, qui ne peut plus attendre de partir à la découverte de nouveaux horizons. Sa réponse fait donc naître sur mes lèvres un léger sourire, me remémorant les instants qu’on a passé ensemble il y a quelques jours dans le village. Le temps que l’inconnu est devant lui, le danger lui importe peu, même s’il dit le contraire. Il possède une passion certaine, à n’en pas douté.

Cependant, la réponse du Yuki fit légèrement ternir le sourire sur mes lèvres. Bien qu’il montre ses capacités de création avec une simple fleur de glace, plutôt bien réussis à vrai dire, le moindre de ses mots semble être… Académique. Du moins, c’est ce que je ressens quand il emploie ces mots. Il semble être là pour être un ninja et remplir sa mission, un point c’est tout. J’espère me tromper à son propos, et qu’il y a bien plus au fond de lui ce qui laisse transparaître, comme un iceberg qui flotte à la surface de l’eau.

- C’est déjà une bien belle fleur pour quelqu’un qui dit utiliser son talent uniquement de manière offensive, ou plutôt, devrais-je dire militaire ? Tu pourrais devenir bon si tu t’entraînes dans cette pratique, j’en suis convaincue.

Avant que notre conversation continue, le très énergétique Kazuo nous demande si on a hâte de commencer la mission, et comme entraînée par l’autre genin, je réponds instinctivement à ce dernier.

- Une mission de rang C… Ça fait littéralement des années que je n'en ai pas faites. Donc je suis excitée de quitter de nouveau le pays pour voir au-delà, dans une mission a porté pacifique qui plus est. J’espère juste que le marchand ne sera pas quelqu’un de pénible avec qui traiter… Ce genre de personnes est souvent imbu de lui-même…

Pendant que nous échangions tous les trois, notre supérieur a enfin terminé avec les cordes avec lesquelles il se battait depuis bien cinq minutes. Je plisse légèrement les yeux à son égard… Il est une encyclopédie, il est vrai. Mais c’est tout ce qu’il est. Je ne sais pas ce qu’il est devenu, mais je parie presque sur le fait qu’il soit un professeur à l’académie désormais. Si son niveau de combat se résume à sa capacité à faire des cordes, même chacun de nous trois, individuellement, doit être plus capable que ce dernier. C’est peut-être pour ça que la Mizukage a jugée bon de nous envoyer nous en plus de ce dernier au final.

Enfin, il semble que tout soit prêt pour le début de la mission. Le genin de glace se dirige vers le navire qui sera notre embarcation pour les jours à venir, et n’ayant rien de plus à faire sur la terre ferme, je lui emboîte le pas, embarquant avec lui sur le navire. Le capitaine nous y attend, et, comme mon camarade avant moi, je salue le capitaine.

- Bonjour Capitaine … euh…

L’homme semble m’observer des pieds à la tête avant de répondre.

- Capitaine suffira. Et non, vous ne pourrez pas endommager mon navire en vous entraînant dessus avec vos jutsus, sauf si vous souhaitez réparer les dégâts de votre poche, et non, vous n’aurez pas accès à tout mon navire, au-delà de votre cabine, de la salle commune et du pont. Et vous serrez notre garde contre les pirates, bien qu’une fois la moitié du voyage d’une à deux semaines parcouru, si les vents sont bons, la menace sera quasiment non-existante avec la flotte du pays de la lune qui patrouille les mers. D’autres questions ?

- Euh… Non, j’ai toutes les informations que je voulais…

- Alors ouste la gamine, j’ai du travail et mes marins aussi. Restez bien gentiment dans un coin les gamins et nous gêner pas !

Sans un regard en arrière, le capitaine se mit à crier des ordres à son équipage, qui commence à fourmiller sur le pont, alors que les deux derniers passagers grimpent sur le navire. Je suppose que sur mer, c’est lui le chef, donc je n’ai rien à redire. Je le regarde un instant avant de continuer mon chemin, suivant un marin qui nous montre les cabines où on est logés pour le voyage. Une étroite cabine par personne, juste assez de place pour y avoir un lit de fortune et de quoi ranger nos affaires. Il est très probable que les chambres plus luxueuses sont réservées pour le marchand et sa garde.

Une fois mes affaires rangées, je retourne sur le pont, pour observer que le navire est enfin en train de naviguer vers le pays de la lune. Grimpant à l’arrière du navire, j’observe le village de Kiri, puis le pays, disparaître petit à petit de l’horizon, alors que l’aube fouette notre visage. On y est, la mission commence…

Bien qu’on a, d’après le capitaine, une ) deux semaines à attendre sur le navire. Heureusement que je me suis préparée à cette éventualité.